Mon frère de vingt ans
Je ne t'ai pas rejoint mon frère de vingt ans
Il n'y a point de pont
pour enjamber le temps
Nous dansions avec les copains ensemble et
L'un sans l'autre
Frappant des poings les portes du désert fermées
Aux caravanes
Rivés ailleurs vos regards privés de rivière
Hantent le vide
Dérive
Hirsute
Vertige
Ta tête tétanique heurtée de vagues
Et ton oreille hurlant de houles
Qui mal accueille
Les casques bleus
Du Congo Congo Congo
Danse clouée de pieds de plomb
Tu coupes de tes coudes toutes
Les fraternités dérisoires
Ton corps décousu penché sur
L'eau verte de tes yeux où tes rêves se noient
L'éventail des tympans déshabille les vagues
TAM TAM des soutes naufragées où
Des peuples noirs migrent vers d'autres rives
Plongée sans masques
La cale de ta tête bouleverse des cantines
Des pans d'espace bleu taillés de cruelles pagayes
Des banquises de ciel dans un fracas muet
Tout s'écroule
Dans ta tête profonde
Où naissent des blessures de fleurs de corail
Dans ta tête nocturne
Où l'on entend derrière le chant des parapets
Les hoquets verts des perroquets
De lune
Ton périple et ton curriculum vitae
S'évitent
Dans la grande bataille de ton voyage intérieur
Vertigineuses voluptés de l'herbe veloutée
Qui brûle en de grandes batailles
De paille dans des greniers de rêve
La misère se rue à ta rencontre
O mer fouillis de sel foulée par tes pieds pauvres
Et tu vis
Pantin pantelant secoué de saccades
Par à coups
Qui déclenchent des fièvres pendant
Que d'invisibles ficelles décousent
Ton corps disloqué
Et ceux qui les ficelles tiennent
Sans cesse délient
Les fils qui te guident
Et te voici qui plie
Et ta taille entaillée par la hâche invisible se
Désarticule
Et tes bras éperdus qui se prennent à vouloir
Saisir le vide
Et le sursaut soudain qui
Cou bascule
Ta tête renversée trouée de tes yeux doux
Le pantin disloqué
Quand s'éveillera-t-il
Son corps se délire en gestes inutiles
Et la vie dont il est
A jamais débranché
Les masques que torturent
L'espace de tes yeux
S'égayent de rires fous
O rires dérisoires et guenilles d'azur
Mon frère de vingt ans j'ai dansé sur le pont
Que tendait ton vertige…
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